lundi 26 juin 2017

Terminus Elicius (Karine Giebel)









Tous les soirs, Jeanne, secrétaire au commissariat de Marseille, prend le même train et s’installe toujours à la même place. Un soir, en passant la main sur le côté de son siège, elle trouve une enveloppe. Poussée par la curiosité, elle découvre une lettre à l’intérieur. Une lettre qui lui est adressée et signée « Elicius ». Une correspondance morbide s’instaure alors car Elicius n’est autre qu’un serial killer sévissant dans la région...

C’est le premier roman de Karine Giebel que je lis. J’ai découvert l’auteur par deux nouvelles. Sa façon d’écrire est brutale, sans concession, voire violente.
Qu’on se le dise, Terminus Elicius n’a rien à voir. Certes il est emprunt de suspense car on souhaite savoir qui est cet assassin et pourquoi il semble si proche de Jeanne, qui n’est pas très nette non plus.
Sur 250 pages, Giebel se contente de nous faire sentir les choses sans pour autant se faire professeur ou plutôt psychiatre de ce qu’elle va décrire. La lecture est donc plaisante dans un décor où le paysage magnifique des voyages en train vient se confronter à la dureté de la vie des grandes villes.

Sans être haletant, sans être immersif, le roman se déroule tranquillement, sans soulever de grandes questions (mise à part celle concernant le final de cette histoire impossible), sans non plus se lancer dans des analyses pointues de la folie. Ce n’est pas le but ici. Le but est simplement de raconter une histoire, de présenter un personnage torturé sans jamais donner beaucoup d’espoir. On peut donc se prendre d’amitié pour Jeanne tout en la craignant.

Rien de bien extravagant donc si ce n’est pour les plus gros bémols de ce livre, à commencer par la manière d’écrire de Giebel. Peut-être que c’était pour se donner un style mais il y a des façons de faire qui, justement, ne se font pas en littérature. Comme changer subitement de sujet en plein milieu d’une phrase et faire parler un personnage pour lui-même. Au départ, c’est déstabilisant et on comprend vite le procédé puisque le personnage principal n’est pas net. Ça accentue cette folie. Soit. Mais quand le procédé est repris pour tous les autres personnages qui eux ne sont pas fous, cela signifie quoi au juste ? On décroche tous plus ou moins à un moment donné, nous tournant vers nos propres pensées mais ici, le procédé devient pénible dans la lecture, m’ayant sorti plus d’une fois de l’histoire, me forçant parfois à reprendre des passages qui d’un coup devenaient incompréhensibles.

Autre figure de style visant à trancher, hacher le texte, afin de lui donner une certaine dynamique : l’épitrochasme. Une succession d’expressions, de mots, simplement posés là sans construction particulière, sans verbe. De temps en temps, pourquoi pas mais à répétition, la lecture en devient fatigante et l’histoire perd de son intérêt. Surtout si c’est juste pour meubler, pour nous faire comprendre ce que l’on a déjà compris depuis le début : Jeanne est folle et Jeanne s’ennuie dans sa petite vie monotone.

Sans aller jusqu’à dire que Terminius Elicius ne présente aucun intérêt, ce n’est pas non plus le roman à lire absolument. Les nouvelles du recueil Maîtres du Jeu étaient beaucoup plus palpitantes.

vendredi 23 juin 2017

25 énigmes de l'âge d'or du cinéma (Pierre Lécuyer)




Menez l'enquête ! 25 énigmes à l'âge d'or du cinéma Devenez expert en enquête criminelle en résolvant ces 25 énigmes dans le monde du cinéma ! Au début de chaque enquête, une courte nouvelle plante le décor, dresse le portrait de la victime et de son entourage, et détaille le déroulement du crime. C'est alors à vous de jouer ! Lisez l'intrigue, étudiez les preuves et élucidez le crime ! Des astuces mécaniques, des témoins à ne pas négliger, des trompe-l'oeil, votre logique sera ici mise à rude épreuve. Ne l'oubliez pas, une enquête est un jeu, souvent mortel. Une construction savamment agencée qui ne recule devant aucun artifice pour acculer dans ses retranchements le lecteur avide de découvrir qui peut être l'assassin. Saurez-vous déjouer le savoir-faire des maîtres de l'illusion et du détournement d'attention ? Cartésien comme Sherlock Holmes, méthodique comme Rouletabille, ou superbe comme Hercule Poirot, devenez, vous aussi, maître dans l'art de la déduction !

À lire cette 4ème de couverture, ce livre pourrait être intéressant, surtout avec cette promesse de nous laisser mener l’enquête et devenir l’égal de Sherlock, Poirot ou encore Rouletabille !
D’accord ! Arrêtez tout de suite de rêver et oubliez cette 4ème mensongère. Inutile de vous vendre du vent.

Déjà, à aucun moment le lecteur n’est invité à résoudre la moindre enquête. Bien entendu que l’on veut savoir qui est le tueur, c’est le principe de n’importe quel roman policier ou thriller digne de ce nom. Un récit bien fait va inévitablement interagir avec le lecteur en le laissant anticiper, réfléchir sur cette fameuse question de « qui qui tue ? »... Ici, aucune interaction à part l’envie de fermer ou plutôt d’éteindre sa liseuse pour revenir au fondamentaux, à quelque chose de mieux construit, de plus intéressant et surtout de mieux écrit.

Les premiers récits sont au présent. L’auteur veut-il donner dans l’originalité ou ne sait-il tout simplement pas écrire une histoire ? Je vous laisse le choix. Car plus loin, on va commencer à lire des histoires comme un auteur les écrirait : passé simple et imparfait de mise. Seulement sur les parties énumérant les faits et la conclusion de l’enquête car l’enquête en elle-même sera au présent. Ne cherchez pas ! On se veut être original qu’on dit !

Les nouvelles sont donc composées de trois parties : les prémices, l’enquête et la conclusion. Bien heureux sera celui capable de résoudre l’énigme dont on ne nous donne que les éléments de surface, principalement des témoignages. Alors je ne sais pas vraiment ce qu’était le relevé des indices dans les années 40 en Amérique et les analyses qui s’en suivent mais quand même, les Brigades du Tigre étaient à la pointe de la technologie dès les années 20.
Passons...

L’enquête... ce sont les deux personnages principaux que l’on retrouve dans chaque histoire qui mène l’investigation et on tombe à ce moment-là sur un livre de cuisine. L’auteur passe son temps à décrire le repas de la baleine enquêtrice ! Ses habitudes alimentaires sont assez variées, il faut le reconnaître, même s’il arrive à vous écoeurer. Donc on a un enquêteur qui passe plus de temps à se goinfrer qu’à enquêter.

De toute façon, la conclusion semble aussi sortir d’un gâteau chinois. Notre enquêteur la résout devant son assiette et fait un peu de sport en se rendant sur les lieux du crime. Il rencontre deux ou trois personnes, souvent plus deux que trois d’ailleurs, et là paf ! Il a la solution... qui se présente d’elle-même en fait. Parce que c’est bien connu : quand un criminel voit les flics débarquer, il avoue son crime tout de suite. Ou alors il a la brillante idée d’écrire ses aveux quelque part sur un carnet qu’il cache au fond de son tiroir dans l’espoir que personne ne le trouvera... Mais notre enquêteur est intelligent, on ne le dupe pas aussi facilement !

Rien dans ces nouvelles ne nous incite à vouloir jouer les enquêteurs. L’écriture est plate, les personnages clichés et hormis ce livre de recette de cuisine, il n’y a absolument rien de pertinent quant au décor, l’ambiance si particulière qu’est Hollywood des années 40. Limite, on se fiche totalement des pauvres victimes et de leur histoire puisque de toute façon on ne nous incite pas à la curiosité.

Et cet âge d’or du cinéma alors ? Encore une autre escroquerie puisqu’au lieu de trouver des anecdotes, à défaut de trouver une réelle documentation sur l’époque, le cinéma et tout ce qui gravite autour, le ou les auteurs pensent qu’il suffit de citer Gary Cooper pour réaliser une plonger vertigineuse dans ce monde aussi féérique que diabolique.
Aucune documentation, aucun fait historique, aucune dénonciation sur les sujets sensibles ou brûlants de ce monde fermé où tout est possible... juste un déballage de noms d’acteur, de producteurs ou de titres de films (et encore quand ces mêmes auteurs y pensent). Du suffisant en somme. Parce qu’il suffit de citer un acteur pour se dire que l’on a écrit un livre sur une période donnée.

Il n’y a donc absolument rien dans ce livre mise à part une sacrée foutue perte de temps !